Vers un « MBDA de l’espace » : Airbus, Thales et Leonardo proposent une super alliance industrielle à Bruxelles

Les grandes manœuvres de l’industrie spatiale européenne entrent dans le vif du sujet. Airbus, Thales et Leonardo ont présenté à la Commission européenne un avant-projet de création d’une société commune regroupant leurs activités spatiales. Il s’agirait d’une alliance stratégique sur le modèle de MBDA, le consortium européen de missiles, qui pourrait voir le jour d’ici la fin de l’année 2026. C’est ce qu’a révélé en avant-première le quotidien français La Tribune.

Un projet de consolidation ambitieux

L’initiative, soutenue par les gouvernements italien et français, représente la première étape formelle vers une éventuelle fusion des principaux acteurs européens du secteur satellitaire. La nouvelle société, dans laquelle chacune des trois entreprises devrait détenir un tiers des parts, ambitionne de devenir un « champion européen » capable de rivaliser au niveau mondial avec les géants américains, à commencer par Starlink de SpaceX.

Ce n’est pas une initiative inattendue : Leonardo, Thales et Airbus discutent depuis longtemps d’une alliance plus étroite dans le secteur spatial. Leonardo et Thales collaborent déjà au sein des coentreprises Thales Alenia Space et Telespazio, tandis qu’Airbus est depuis des années une référence dans la production de satellites.

Une réponse aux difficultés du secteur

Le contexte dans lequel cette initiative est née est tout sauf simple. Thales Alenia Space a clôturé l’année 2023 sur des résultats négatifs, en raison de la crise des satellites géostationnaires, qui a également entraîné une réduction des effectifs, notamment en France. Airbus, pour sa part, a annoncé des suppressions d’emplois pouvant atteindre 2 500 postes dans sa division Defence and Space. Dans les deux cas, la pression concurrentielle croissante des opérateurs privés et des constellations de satellites à orbite basse pèse également.

Le tournant décisif : Bruxelles

La balle est maintenant dans le camp de la Commission européenne. Les discussions entamées avec l’exécutif de l’UE n’en sont qu’à leurs débuts, mais elles constituent un test pour la nouvelle stratégie industrielle de l’Union. Comme le souligne La Tribune, le résultat de l’opération dépendra dans une large mesure de la position de l’autorité européenne de la concurrence. Il reste notamment à voir comment la nouvelle commissaire à la concurrence, Teresa Ribera, conciliera les ambitions industrielles de l’Europe avec les règles traditionnelles du libre marché.

Le scénario concurrentiel et les inconnues

Parmi les obstacles potentiels figure également l’entreprise allemande OHB, active dans le secteur spatial, qui pourrait soulever des objections quant à une éventuelle concentration excessive du pouvoir entre les mains des deux principaux fabricants européens de satellites.

Cependant, le climat politique actuel semble favorable aux initiatives visant à renforcer l’autonomie stratégique de l’Europe. Comme l’a déclaré la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, au Forum de Davos : « L’échelle continentale est notre plus grande ressource dans un monde dominé par les géants ».

Un regard vers l’avenir

Le « Project Bromo » – dont le nom fait référence à un volcan indonésien – vise donc à doter l’Union européenne d’une plateforme spatiale industrielle intégrée, à l’instar du succès obtenu par MBDA dans le domaine des missiles. S’il est réalisé, le projet pourrait révolutionner le paysage spatial européen, en offrant au continent un nouvel outil pour relever les défis de l’avenir dans l’espace.

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